Lors d’un séjour dans la capitale, il suffit de lever la tête pour trouver des traces de la présence du Dieu du football : Diego Maradona. En effet, les fresques murales en son honneur abondent.
Une visite de La Boca à Buenos Aires est la façon la plus simple et classique de mesurer le culte dont il fait l’objet.
Toutefois, si vous êtes intéressé par Maradona, je vous invite plutôt à sortir des sentiers battus et à vous rendre dans le quartier La Paternal. Ce sera, qui plus est, l’occasion de découvrir une zone habituellement boudée par les touristes.
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Pas le temps de tout lire ? Voici les infos à retenir :
- Visiter La Paternal est probablement la manière la plus authentique de se faire une idée de l’empreinte laissée par Diego Maradona à Buenos Aires. Cet article se concentre donc sur les lieux de culte situés dans ce quartier.
- Bien entendu, La Boca est également un haut lieu de pèlerinage pour tout maradonien qui se respecte.
Besoin d’explications complémentaires ? Voici ce que propose cet article :
Maradona, d’enfant de Villa Fiorito à légende du football
Pour comprendre ce lien si fort avec les habitants de Buenos Aires, en particulier, et les Argentins, en général, il importe de revenir non sur quelques événements marquants de la vie et de la carrière de Maradona.
Diego Maradona a vu le jour le 30 octobre 1960. Il a passé sa jeunesse dans une ville située au sud-ouest de Buenos Aires : Villa Fiorito. Cette ville ouvrière reflète parfaitement les origines humbles de celui qui allait devenir une légende planétaire, sans jamais oublier d’où il venait.
Issu d’une famille nombreuse et pauvre, Maradona a grandi dans des conditions précaires, où le football était bien plus qu’un jeu : c’était une échappatoire et une lueur d’espoir dans un quotidien difficile.
Dès son plus jeune âge, Diego a montré des talents hors du commun. À seulement 9 ans, il a intégré l’équipe de jeunes Cebollitas, centre de formation et antichambre d’Argentinos Juniors, club professionnel de la capitale.
C’est dans cette équipe de La Paternal, quartier du nord-ouest de Buenos Aires, que Maradona a fait ses débuts professionnels. À seulement 15 ans, il jouait déjà dans l’équipe première, éblouissant les spectateurs par ses dribbles et sa vision du jeu.
Portant le maillot d’Argentinos Juniors pendant 5 ans, ses exploits ont rapidement attiré l’attention des plus grands clubs argentins.
Diego Maradona a alors franchi une nouvelle étape en rejoignant Boca Juniors, le géant du quartier populaire de La Boca. Son bref passage a été marqué par une victoire en championnat, face au grand rival River Plate, renforçant ainsi son statut d’idole nationale.
Il a été transféré à Barcelone en 1982, avant d’atteindre le sommet de son art sous les couleurs de Naples.
Après avoir mené l’Argentine à sa deuxième victoire en Coupe du Monde, lors du Mondial 1986 au Mexique, il est devenu une légende vivante dans son pays. Le quart de finale épique contre l’Angleterre, où il a inscrit un doublé mémorable (le but du siècle et la main de Dieu), a été vécu comme une revanche après la Guerre des Malouines.
En 1997, il a disputé une dernière saison à Boca Juniors et a raccroché les crampons dans la ville qui l’avait vu débuter.
Après le décès de Diego Maradona, survenu le 25 novembre 2020, le président de la République a décrété 3 jours de deuil national. Les Argentins ont été conviés à lui rendre un dernier hommage à la Casa Rosada (le palais présidentiel) : son cercueil y a été exposé pendant une journée, le jeudi 26 novembre 2020. En pleine pandémie de Covid-19, d’innombrables fans ont répondu présents. Cet événement a montré à quel point Maradona transcende les générations.
Rien d’étonnant à cela. Diego Maradona faisait déjà l’objet d’un culte de son vivant. Il existe une église qui lui est dédiée, la Iglesia Maradoniana, dont Emir Kusturica s’est fait écho dans son documentaire de 2008 consacré à la star du ballon rond. Les membres de cette église idolâtrent celui qu’ils appellent « D10S » (mot né de la combinaison de Dios – Dieu en espagnol – et de 10, le numéro floqué sur le maillot de Maradona).
Plus de 4 ans après sa mort, les lieux de culte demeurent nombreux à Buenos Aires. Ils permettent aux fans de partir sur les traces de celui qui était surnommé le Pibe de Oro (le gamin en or).
La Paternal, Tierra de D10S
Encore plus que La Boca, Maradona est omniprésent dans le quartier qui a été le théâtre de ses débuts et de ses premiers exploits en tant que professionnel. La Paternal est incontestablement le principal pôle touristique maradonien de la capitale.
Vu la diversité des sites à parcourir, une visite thématique d’au moins une demi-journée peut être envisagée, par vos propres moyens ou accompagné d’un guide.
Carte des lieux dédiés à Maradona dans le quartier de La Paternal
Cette carte vous aidera à repérer aisément les lieux dédiés au culte maradonien.
J’y ai également indiqué la station de la ligne de train San Martín qui relie la gare de Retiro au quartier de La Paternal. C’est le moyen de transport le plus rapide et économique pour rejoindre ce quartier excentré depuis le centre de Buenos Aires.
La Casa de D10S
Pour les 18 ans de Maradona, le club Argentinos Juniors a offert une maison à Diego Maradona et à sa famille à proximité du stade pour qu’il n’ait pas à retourner à Villa Fiorito tous les jours. Il y a vécu avec ses parents, frères et sœurs de 1978 à 1980.
Aujourd’hui, la maison est un musée ouvert au public : la cuisine de Doña Tota (surnom de la mère de Maradona), le salon familial, avec les meubles et la décoration d’époque, sont extrêmement bien préservés.
On peut même jeter un coup d’œil à la salle de bain et aux toilettes, qui prouvent (à ceux qui en doutaient) que même Dieu doit satisfaire des besoins basiques :
En montant à l’étage, on découvre la chambre de Diego. Il avait, dit-on, coutume de sortir par la fenêtre pour accéder plus rapidement à la terrasse.
Outre une petite boutique de souvenirs, l’étage abrite un sanctuaire avec des objets laissés par ses dévots :
Une parodie de La Cène (la célèbre peinture de Léonard de Vinci) montre Diego au centre, entouré de Pelé à sa droite et de Lionel Messi à sa gauche :
Les murs du sanctuaire accueillent des mots d’amours dans toutes les langues du monde. Vous en trouverez plusieurs écrits en français :
Sur la terrasse, une fresque émet l’hypothèse que Diego Maradona ne serait pas un être divin, mais bien plutôt un extraterrestre. Voilà un excellent sujet pour la prochaine épreuve de philosophie du baccalauréat :
L’entrée coûte 12 000 ARS.
En principe, la maison-musée est ouverte du mardi, le jeudi et le samedi de 10 h à 17 h . Mais, il vaut mieux vérifier régulièrement les horaires sur le compte Instagram de La Casa de D10S.
La réservation étant conseillée, je vous suggère de contacter Cesar, principal gérant de cette maison-musée, via WhatsApp : +54 9 11 4979-7075
Bendito 10
En sortant de La Casa de D10S et en prenant la direction du stade Diego Armando Maradona, vous n’aurez pas à marcher longtemps pour apercevoir au loin un bâtiment qui ne passe pas inaperçu : une statue XL et une imposante fresque à la gloire de Maradona donnent vie à sa terrasse.
Ce lieu n’est autre que Bendito 10. Situé à l’intersection de Lineo et Álvarez Jonte, il s’agit d’un musée dédié à l’art maradonien :
Y sont exposées les œuvres de Marcelo Chiarello ainsi que celles d’autres artistes (peintres, caricaturistes, etc.) qui en ont fait don. Maillots, photos, articles de presse et objets de toutes sortes apportés par des fans complètent la collection. On y trouve un bulletin de classe de Maradona à l’époque où il était à l’école primaire ou encore des pièces de monnaie et des tickets de métro à son effigie :
Le travail de Marcelo Chiarello, qui se définit comme un mosaïste maradonien, est probablement ce qui retient le plus l’attention. La figure de Maradona a généré une infinité d’expressions artistiques et/ou publicitaires. Chiarello a choisi la mosaïque.
Et il est devenu mosaïste parce qu’il était maradonien. Autrement dit, il y a 7 ans, cherchant un moyen original de rendre hommage à Maradona, il a tout appris de A à Z.
Céramiques, azulejos… Chiarello ne manque pas d’idées pour donner vie aux nombreux Diegos qui ont existé au cours de l’histoire. Le gamin prodige, le joueur confirmé, l’entraineur, le fumeur de cigares, etc. Avec une crinière, avec les cheveux courts ou une mèche blonde. Gros ou maigre. En short ou en costume :
Le jour où Maradona devait fêter ses 64 ans, il a dévoilé de nouvelles mosaïques en présence de proches de l’idole :
Son travail de mosaïste lui a d’ailleurs permis de nouer des liens avec la famille de Diego, notamment ses sœurs qui sont venues lui donner leur bénédiction.
L’entrée est libre, mais une contribution est bienvenue pour que ce lieu étonnant continue de grandir.
Pour tout renseignement, vous pouvez contacter Marcelo Chiarello via WhatsApp : + 54 9 11 3861 2403
Estadio Diego Armando Maradona (Argentinos Juniors)
Comme indiqué précédemment, le talent de Diego Maradona a été repéré très tôt. À seulement 15 ans, il débutait sur la pelouse du terrain qui porte désormais son nom.
Certes, depuis que Naples a décidé de rebaptiser son stade en l’honneur de Diego Maradona, celui d’Argentino Juniors ne saurait être considéré comme le plus célèbre antre sportif portant le nom du footballeur de génie.
Même si les années passées dans le sud de l’Italie furent les plus glorieuses, c’est bien ici que Maradona a commencé sa carrière et s’est fait un nom. Entre 1976 et 1981, il y inscrivit pas moins de 116 buts en 166 matchs.
La visite du stade mérite d’être complétée par celle du musée, qui comprend (lui aussi, décidément), un sanctuaire dédié à Diego, où de nombreux fans laissent leurs maillots en hommage :
Fresques murales
Les murs d’enceintes du stade sont couverts de fresques murales en l’honneur de Maradona.
Ces portraits mettent en avant des moments emblématiques de sa vie. On le voit ainsi vêtu des différents maillots portés au cours de sa carrière :
Nombre de fresques recréent des photos historiques, comme celle où Maradona est entouré de ses parents :
L’intention des muralistes est de le représenter à différents âges de sa vie, sans négliger les périodes où il était en proie à de graves problèmes de santé :
Mais les artistes de rue ne se sont pas arrêtés là. Le long des 3 cuadras séparant le stade et la Casa de D10S, notamment, vous pourrez admirer de nombreuses autres peintures murales.
Tout le quartier semble vouloir rendre hommage à son citoyen le plus célèbre.
Lo De Tato
À 2 pas du stade, au 2246 Avenida Boyacá, se trouve Lo de Tato, un bistro tenu et géré par Tato et sa femme.
Le restaurant est décoré de maillots des Argentinos Juniors et est inextricablement lié à l’équipe, car Tato a joué avec Maradona lui-même.
Prenez le déjeuner ici pour manger un morceau d’histoire des Argentinos Juniors et admirez sa collection de maillots et de souvenirs de l’équipe.
La Cafeteria de D10S
Sur la même cuadra, à l’opposé, vous trouverez La Cafeteria de D10S. Tandis que Lo de Tato est dédié aux Argentinos Juniors, ce restaurant est un sanctuaire (encore un !!!) consacré à Maradona.
Se situant sur le chemin entre le stade et sa maison, Diego avait l’habitude de s’y arrêter pour engloutir une milanesa. Vous pourrez donc y faire une pause gourmande bien méritée après votre pèlerinage dans le quartier :
Maradona Experience
Sachez que ce parcours dans le quartier de La Paternal peut être réalisé dans le cadre d’une visite guidée organisée par Fútbol Experience, une petite agence spécialisée dans le tourisme footballistique. Sont inclus :
- l’accompagnement par un guide local
- le transfert depuis l’hôtel
- le déjeuner
- l’entrée dans le stade Diego Armanado Maradona d’Argentinos Juniors
- la visite de 2 musées consacrés à Diego Maradona
- la visite du sanctuaire
- la visite de la Casa de D10S
- des cadeaux pour chaque participant
La Maradona Experience coûte 85 US $ par personne. Elle est organisée tous les mardis, jeudis et samedis de 10 h à 14 h 30 environ. Elle est proposée en anglais et en espagnol.
Paiement possible en espèces ($ ou pesos argentins) ou par virement.
Réservation via WhatsApp : +54 9 11 2659 7630
La Boca, l’autre quartier de Maradona
Comme indiqué précédemment, Diego Maradona a évolué plusieurs saisons à Boca Juniors (avant de partir en Europe, puis à la fin de sa carrière).
Visiter La Bombonera, stade mythique de Boca, et le Museo de la Pasión Bosquense, qui rend hommage au numéro 10, est une halte incontournable pour tout fan qui se respecte (quitte à casser sa tirelire, car l’entrée de ce musée de Buenos Aires n’est vraiment pas donnée).
Il suffira de parcourir le chemin conduisant du Caminito à La Bombonera pour voir de nombreuses hommages à Diego Maradona :
Même les kisocos apportent leur pierre à l’édifice mémoriel :
Par ailleurs, dans le quartier de La Boca, il existe un bar-boutique thématique, Lo Del Diego, entièrement dédié à D10S :
Il se situe sur l’Avenida Don Pedro de Mendoza, à côté du Museo Benito Quinquela Martín, à proximité immédiate du Caminito.
Bien évidemment, la dimension commerciale (pour ne pas dire opportuniste) d’un lieu de ce type n’échappe à personne. On trouve tout et n’importe quoi à l’effigie de Maradona. Un peu comme à Lourdes où la manière de vendre de la Vierge Marie se renouvelle éternellement :
Mais ne soyons pas trop critique, on peut entrer librement dans Lo Del Diego et les vendeurs ne sont pas particulièrement insistants. Après Léonard de Vinci dans le sanctuaire de La Casa de D10S, ici Michel-Ange a fait des émules : une parodie de La Création d’Adam se donne à vos yeux ébahis :
D’autres traces de D10S à Buenos Aires
Si La Paternal et La Boca sont les 2 quartiers maradoniens par excellence, vous ne manquerez pas d’observer que l’impact de Maradona se reflète ailleurs en ville.
Certes, de nombreux artistes ont célébré sa vie et son parcours par des chansons, des poèmes, des sculptures.
Cela dit, Buenos Aires, avec ses peintures murales, donne parfois l’impression d’être devenue une galerie à ciel ouvert dédiée à l’héritage de D10S.
L’Avenida de Mayo, bien entendu, ne saurait échapper au phénomène. La façade du Bar Pichín (au numéro 802) en atteste :
Le culte se propage dans le grand Buenos Aires, comme en témoigne cette fresque observée dans une rue de Tigre :
Bien entendu, depuis la victoire lors de la Coupe du Monde 2022 et les 2 triomphes successifs en Copa America, Lionel Messi est, lui aussi, définitivement entré dans le cœur des Argentins.
Il n’éclipse pas pour autant Maradona. Les 2 légendes du football sont régulièrement représentées côte à côte.
Ce qui donne lieu à diverses tentatives syncrétiques (plus ou moins abouties) :
En conclusion
Maradona et Buenos Aires semblent unis par une passion amoureuse. Cela se ressent tout particulièrement dans les quartiers de La Boca et, surtout, de La Paternal.
Pour les habitants de la capitale argentine, Diego Armando Maradona n’est pas seulement une légende, il est une partie intégrante de leur quotidien.